Informations
Nom :
DE LÉON
Prénom :
Conan Le Bref
Sexe :
M
Titre :

Ordre :

Naissance :

Décès :
Après 1203
Mariage :

Fiançailles :

Père :
Guyomarc'h V DE LÉON
Mère :
Margelie DE POHER

Femme(s) :
Alix Ière EUDONIDE
Enfant(s) :
Isabeau DE LÉON
Notes "Conan, comte de Léon, épousa N. soeur d'Alain, comte de Penthièvre, fondateur de Beauport" (Dom MORICE, 1742-6) vicomte de Léon (9e)(Conan de Léon)

Conan Ier le Bref (disparu avant 1231)

Conan de Léon est capturé avec Arthur, duc de Bretagne, à Mirebeau, durant l’été 1202. Le roi d’Angleterre, Jean sans Terre, fait immédiatement délivrer Conan moyennant quarante marcs d’argent, en août 1202. Des tractations sont alors engagées pour obtenir l’élargissement des nombreux barons bretons captifs. En août 1203, grâce à l’entremise de l’abbé de Beauport et de son frère aîné Guyomarch, la rançon de Conan est fixée à 4 000 livres. Cependant, Conan n’est libéré qu’en juin1205, quand les armées du roi Philippe Auguste investissent le château de Chinon, son lieu de détention. Conan succéderait à son père vers 1210, deux ans après la disparition de son frère aîné Guyomarch, en 1208.

En 1212, le roi Philippe Auguste confie à Conan de Léon le bail de la terre du défunt Alain, comte de Goëlo, son parent, jusqu’à la majorité de son fils, le jeune Henri. Ce dernier a été promis en mariage à Alix, fille de la duchesse Constance et héritière du duché de Bretagne, par le roi en 1209. Mais le roi se ravise et, en 1213, unit la jeune fille à un cousin éloigné, Pierre de Dreux, dit Mauclerc. Le nouveau duc, invoquant le droit de garde féodale, envahit les terres du jeune Henri en 1214 et ne lui en laisse que la jouissance du sixième car il estime que cet important apanage constitue une menace pour la couronne ducale. Conan de Léon réagit en tant que tuteur d’Henri et voit ses terres également investies parMauclerc qui agit en maître à Lesneven durant l’été 1216, s’attribuant tous les droits et les coutumes de la ville. Guillaume le Breton relate que Conan et Salomon de Léon résistent désespérément, menant une inlassable guérilla, et sont contraints de trouver refuge dans les bois et de piller leurs propres terres durant des années. Vers 1222, d’autres nobles bretons se joignent à eux, formant une vaste coalition dont Pierre Le Baud indique qu’elle comprend outre Guyomarch, Hervé,Conan et Soliman de Léon, Olivier, vicomte de Rohan, Soudan, vicomte du Faou, Hervé du Pont et plusieurs autres barons, ± tellement qu’ils chassèrent ledit Pierre de la basse Bretagne, & prindrent plusieurs chasteaux qu’il tenoit pour Jean son fils . Conan de Léon ne se soumet qu’après la victoire de Pierre Mauclerc sur les contingents d’Amauri de Craon, sénéchal d’Anjou, qu’il défait lors de la bataille de Châteaubriant, en 1222. Les Léonards obtiennent alors une paix honorableet sont remis en possession de leurs droits par le duc qui conserve néanmoins la quasi-totalité des biens d’Henri de Penthièvre, qui prend alors le nom d’Avaugour, ainsi que probablement la cité de Lesneven, au cœur du Léon. En 1225, Conan et Salomon de Léon sont présents auprès de Pierre Mauclerc, au moment de la fondation de Saint-Aubin-du-Cormier. On ignore la date exacte de la mort de Conan qui apparaît encore dans une note chronologique de Pierre Le Baud en 1229 mais disparaît avant 1231.

Conan aurait épousé N., sœur d’Alain, comte de Goëlo, auquel échut le Penthièvre, vers 1205, ce qui faisait de lui le plus important baron de Bretagne avant la confiscation de ses terres par Mauclerc, en 1214. De cette union est issu Guyomarch VI, qui suit. Dom Morice leur donne aussi pour fille Isabeau, épouse d’Alain VI, vicomte de Rohan, qui fonde une messe anniversaire en sa faveur dans l’église de Beauport au moment de son décès, en 1266. Cependant, le fait qu’elle porte letitre de ± dame de Correc et qu’elle ait reçu des biens en héritage dans le Goëllo semble plutôt en faire une fille de la famille de Goëllo-Avaugour.

L’union de Conan avec la sœur d’Alain de Goëlo paraît trouver un écho, au moins indirect, dans la Legenda sancti Budoci, dont la première partie est formée par la ± merveilleuse et édifiante histoire du roi de Brest et d’Azénor sa fille, épouse de Goëlo (pulchra et pia historia regis Brest et Azenor suae filiae et uxoris de Gouellou). Cette ± histoire a connu des aménagements successifs destinés à faire entrer le récit primitif dans un cadre hagiographique plus contraignant, plus ± rationnel , et à en restreindre la dimension exagérément ± romanesque , telle qu’elle se manifeste par ailleurs dans le Livre de Caradoc, composé à la fin du XIIe siècle, qui présente avec l’histoire d’Azénor une incontestable parenté. Azénor, sur les conseils du ± vicomte du pays, très avisé et homme d’expérience, inspiré par l’Esprit-Saint (proconsul illius terrae, prudentissimus et senex, Spiritu Sancto repletus), parvient à libérer le roi de Brest, son père, d’un ensorcellement, au prix de l’amputation de son sein ; mais elle est faussement convaincue d’adultère à la suite des accusations de sa marâtre sur les origines de la merveilleuse prothèse mammaire en or dont elle a été gratifiée. Condamnée à mort par son père, roi de Brest, et par son mari, roi de Goëlo, son châtiment est finalement commué en une ordalie, sur l’intervention du ± sage vicomte (sapiens proconsul), car Azénor est enceinte : abandonnée alors au gré des flots marins dans untonneau, miraculeusement assistée de sainte Brigitte, elle donne le jour à bord de cet esquif au futur saint Budoc ; la mère et l’enfant sont ensuite recueillis par les moines de l’abbaye irlandaise de Beauport, où ils ont abordé. Le roi deGoëlo, ayant découvert qu’on lui avait menti sur la prétendue infidélité de son épouse, cherche Azénor pendant plusieurs années ; au terme de leurs touchantes retrouvailles, l’un et l’autre meurent, laissant orphelin le jeune Budoc.

Azénor est ainsi présentée par son biographe comme un parangon de dévouement filial, de fidélité conjugale et d’amour maternel, le tout à des fins manifestes d’édification des fidèles ; mais le personnage de la fille du roi de Brest tel que le décrivait la tradition orale était sans doute beaucoup plus proche, à l’origine, du modèle qui a inspiré celui de l’héroïne du Livre de Caradoc, Guinier, archétype de l’amante courtoise qui ne dédaigne nullement ± de goûter les plaisirs dulit . Il est assez évident en effet que le providentiel et le miraculeux ont été introduits dans l’histoire d’Azénor pour contrebalancer ce que le récit originel contenait de ± magique et de ± merveilleux (le serpent enroulé autour du brasdu roi de Brest et qui retire sa vitalité au monarque, la prothèse en or venue remplacer le sein amputé d’Azénor) : ainsi on voit par exemple sainte Brigitte, dans son rôle traditionnel de recours des parturientes, veiller sur la malheureuseprincesse quand celle-ci met au monde saint Budoc, durant la traversée de la Manche, à l’intérieur même du tonneau qui leur sert d’embarcation. Devenu adulte, Budoc, dont le peuple connaît les origines royales, est sollicité pour ceindre la couronne d’Irlande, qu’il refuse. Il accepte par la suite la charge d’archevêque de l’île ; mais il doit fuir une population que sa rigueur pastorale a dressée contre lui. Il passe alors en Bretagne et s’installe successivement à Porspoder, puis à Plourin-Ploudalmézeau. Notons que les ermitages attribués à saint Budoc par son hagiographe sont situés dans l’immédiat voisinage de Landunvez où s’élève le château de Trémazan, devenu à partir du XIVe siècle la résidence principale de la puissante famille du Chastel : on peut d’ailleurs lire dans la généalogie publiée par le père Anselme qu’une fille de Tanguy du Chastel et de Tiphaine de Ploesquellec, mariée en 1373 à Yvon Prévost, seigneur de Kerbastard, se nommait Azénor, ce qui permet de situer vers 1350 le terminus ante quem de la composition de la Legenda sancti Budoci. Enfin, toujours selon son hagiographe, Budoc est finalement promu sur le siège archiépiscopal de Dol qu’il occupe pendant vingt-cinq années, jusqu’à sa mort : la liste des prélats dolois qui figure dans la Chronique de Dol mentionne que Budoc fit le pèlerinage de Jérusalem, d’où il avait ramené de précieuses reliques. De telles mentions sont caractéristiques d’ouvrages hagiographiques composés dans le contexte de l’essor des pèlerinages hiérosolomitains dont les premières croisades constituent l’aboutissement, aux XIe-XIIe siècles : cette période constitue donc le terminus a quo de la composition de la Legenda sancti Budoci, qu’un certain nombre d’indices permet de dater en fait de la première moitié du XIIIe siècle.

La genèse de cet ouvrage peut ainsi être assez facilement reconstituée : après avoir rapproché la forme vernaculaire du nom de la princesse, Énori (Honorée), de celui de l’épouse de saint Efflam, sainte Énora, héroïne d’une traversée miraculeuse de l’Irlande à la Bretagne, l’hagiographe s’est avisé que la vita de saint Kentigern contenait une anecdote similaire, dont il s’est très largement inspiré. En effet, Thaney, mère de Kentigern, alors enceinte de ce dernier, avait été injustement soumise à une ordalie par son père, roi d’Irlande, et placée sur une embarcation sans voile, ni rames : la princesse a ainsi dérivé au gré des courants marins pour finalement aborder sur un rivage d’Écosse où elle et son fils, né peuaprès l’accostage, sont recueillis par saint Servan. Le biographe de Budoc précise, comme nous l’avons indiqué, que le futur saint et sa mère ont été, quant à eux, recueillis à l’abbaye de Beauport, en Irlande ; mais il s’agit d’une référenceincontestable à l’abbaye homonyme, située à Kerity (Côtes-d’Armor) et fondée par Alain de Goëlo au début du XIIIe siècle : l’écrivain en effet a décrit un monastère d’hommes, alors que l’abbaye irlandaise est un établissement de femmes. Sousla forme Aliénor, le nom de l’héroïne, ± absent des chartes bretonnes avant la fin du XIe siècle, rare au XIIe , est porté à l’époque de la composition de la légende de saint Budoc par l’héritière du duché de Bretagne, tombée en 1203, peu après son frère, le malheureux Arthur, ± entre les griffes de son oncle, Jean sans Terre. Si elle ne fut pas comme lui assassinée, elle fut du moins gardée prisonnière, près de trente-huit ans, par le souverain anglais . Comme le souligne Bernard Tanguy, ± que dans un tel contexte le nom d’Azénor soit venu sous la plume du rédacteur de la Legenda sancti Budoci remplacer celui populaire d’Énori n’a rien que de très plausible . Enfin, nous avons insisté sur le fait que le récit mentionne le ± vicomte du pays , aux sages avis de qui s’étaient successivement rendus Azénor, puis le roi de Brest : le rôle essentiel attribué à ce personnage renvoie à la proximité du vicomte de Léon, Conan, avec la maison de Goëlo, dont il avait épousé une fille.

Il faut en outre souligner que le nom Conan, qui, comme nous le verrons plus loin, sert, au début du XIVe siècle, à l’auteur du Livre des faits d’Arthur à forger le terme ± Conanigènes , par lequel cet écrivain désigne les membres de la dynastie vicomtale de Léon, apparaît tardivement au sein de ce lignage, avec le fils probablement cadet du vicomte Guyomarch. Ce dernier, mort après 1210, aurait dû avoir pour successeur son fils aîné, lui aussi appelé Guyomarch, à qui les actes donnent le qualificatif junior pour le différencier de son père. Toutefois, ce Guyomarch le Jeune meurt en 1208, apparemment sans alliance ni postérité, et ses droits passèrent alors à Conan, dont la participation à la tentative désespérée d’Arthur Ier sur le Poitou en 1202, puis le conflit durable qui l’opposa à Pierre de Dreux, ont donné naissance, sous forme légendaire, à une postérité littéraire dont témoigne la Chanson d’Aiquin, qui mentionne ± Dom Conayn de Leon le sené/ Qu’en son escu porte un leon doré : le ± sené , c’est le ± sage , qualificatif que nous avons vu déjà attribué au vicomte anonyme qui figure dans la Legenda sancti Budoci. Quant à l’écu au lion, ce sont bien sûr les armes parlantes du vicomte ;mais, curieusement, la couleur de la figure est ici inversée, puisque le lion est d’or, alors que les armes traditionnelles se lisent ± d’or au lion de sable : peut-être s’agit-il d’une fantaisie du poète ? À moins que nous ne disposions, en l’occurrence, d’un précieux témoignage sur les armes primitives de Léon.

Il est possible que le nom reçu par Conan, dont la naissance se situe vers 1165-1170, reflète le succès de l’Historia regum Britanniae ; mais à l’époque, ce nom est aussi celui du duc de Bretagne, lequel entretient avec les vicomtes de Léondes rapports complexes, qui n’excluent pas le parrainage d’un rejeton de cette maison. En tout état de cause, nulle trace à cette époque d’une tradition plus ancienne qui rattacherait le lignage vicomtal à Conan Mériadec, d’autant plus que Conan de Léon n’est pas a priori destiné à hériter du titre. Cette tradition est donc plutôt à interpréter comme la conséquence de l’hapax que constitue l’apparition du nom Conan dans la succession des vicomtes de Léon ; elle apparaît après queles vicomtes de Rohan eurent reçu en héritage l’ensemble du patrimoine de la branche cadette de la maison de Léon, en 1363. S’appuyant sur la proximité de Pontivy avec Stival, où est honoré saint Mériadec, évêque de Vannes, dont le nom fut alors facilement rapproché de celui de Conan Mériadec, elle est mise en forme dans les années 1420-1440 et, utilisée à des fins politiques par Jean II de Rohan dans les années 1480, elle reçoit ses ultimes perfectionnements des premiers historiens de la Bretagne, comme on vient de le voir en ce qui concerne Pierre Le Baud. Cette tradition pousse par la suite les Rohan, dans les premières décennies du XVIe siècle, à tenter – vainement – une usurpation du titre de vicomte de Léon, avant de revendiquer l’appellation ± prince de Léon qui finit par leur être reconnue, sinon officiellement, du moins dans l’usage, sous l’Ancien Régime.

Source : http://www.tudchentil.net
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